En 2010, j’imaginai le blog Petites Idées pour Grandes UTopies et… ça a changé ma vie. {Découvrez mon parcours chez Antigone XXI}.
Aujourd’hui, je suis en train de créer un espace dédié à la transmission de la cuisine bio végétale à Paris, pour en faire la 1ère vitrine bio & végane de France. {Découvrez La Parenthèse Végétale}. C’est fou !
Pour fêter cet anniversaire très important pour moi, je voudrai commencer par vous adresser un grand MERCI. Merci d’être plus enthousiastes les uns que les autres lorsque vous testez mes recettes et participez à mes cours, merci d’adopter mes petits plats en les faisant vivre chez vous, merci pour vos messages, vos encouragement et votre incroyable soutien !
Ensuite, j’ai choisi de rendre hommage au sujet principal de ce blog : la cuisine végétale, qui me passionne et me porte dans ma vie personnelle et professionnelle.
Il y a quelques mois, j’ai lu dans un livre américain de cuisine végétalienne que « la clé de la bonne cuisine végane était la substitution ». Mon cœur de créatrice culinaire a fait un bond !
Plus récemment, je suis tombée sur un article dans lequel une personne goûtait un fromage végétal industriel, trouvait que c’était très mauvais, et, globalement, affirmait que la cuisine végétale était bonne à jeter. Pour moi, c’est un peu comme goûter une Vache qui …, et en conclure que la cuisine française n’est pas terrible. C’est totalement réducteur et d’une absurdité sans nom.
La cuisine végane n’est pas une cuisine de substitution. La cuisine végétale ne peut pas être ramenée à un seul ingrédient, et elle n’est pas une sous-cuisine. La cuisine végane peut être goûteuse, colorée, réconfortante, légère, extra gourmande, pepsy, fine, rustique, etc. La cuisine végane ne contient pas de produits animaux, à part ça, elle est ce que vous voulez qu’elle soit, point.
La richesse du végétal est incroyable. Elle est telle que je peux affirmer que nous n’avons pas idée de tout ce qu’il est possible de créer. Elle est telle qu’après 20 ans de végétarisme et 7 ans de création culinaire 100% végétale, je fais des découvertes étonnantes chaque jour, et je sais que je continuerai d’apprendre encore et encore.
La cuisine utilisant des animaux ne devrait pas être un mètre étalon auquel la cuisine végétale devrait se comparer sans arrêt. Il n’y a pas d’un côté, la « bonne cuisine » avec viande, et de l’autre, la « moins bonne cuisine » sans viande. Il y a simplement une diversité de cuisines, certaines exploitent et tuent des animaux, d’autres non.
Pourtant, en cuisine végétale, on utilise souvent le mot « remplacer ». On peut remplacer les œufs, la viande, le fromage, le beurre, etc. Si on remplace tout ça, c’est bien qu’il s’agit d’une cuisine de substitution, non ?
Pas nécessairement. Ça signifie simplement que dans notre culture, on utilise des œufs, du beurre, du fromage, de la viande et que souvent, on ne sait pas faire autrement. Ça signifie qu’on est attaché à des produits, émotionnellement, comme Proust et sa Madeleine, et qu’on voudrait ne pas s’en séparer. C’est pourquoi lorsqu’on veut diminuer ou arrêter la viande, on est tenté de la remplacer.
Évidemment, aimer une culture, adorer les plats de son enfance, c’est tout à fait légitime. Il y a un vrai plaisir à retrouver les joies des repas qu’on aimait naguère. Si cela doit passer par l’imitation de produits animaux, pourquoi pas ? Au contraire, je suis ravie qu’on puisse aisément déguster de bonnes lasagnes, un burger savoureux, une blanquette des familles, sans utiliser aucun produit issu de la souffrance animale.
Ce que j’aimerai communiquer, c’est que la cuisine végane est bien plus que ça. Pour s’en rendre compte, il suffit d’un peu d’imagination, d’une bonne dose d’ouverture d’esprit, et de beaucoup de gourmandise.
Prenons mon cas. Ma famille n’était pas très portée sur la gastronomie, et j’ai arrêté de manger de la viande à l’âge de 13 ans. Du coup, bien qu’élevée en France, je n’ai pas grandi avec les repères de la cuisine française. En fait, je suis pas tellement attachée à une culture culinaire bien définie.
J’ai découvert le plaisir de manger et de cuisiner à l’âge adulte, à un moment où j’ai pas mal voyagé. Dans mon univers gourmand, se mélangent entre autre : le nasi goreng et le tempeh indonésien, le stoemp belge, les spaghetti chers à mon amoureux, ainsi que mon attirance pour les cuisines libanaises et indiennes, et mon grand amour pour la découverte en général.
Du coup, j’adore créer des plats qui ne ressemblent à rien de ce qu’on trouve en « cuisine classique occidentale », et je n’ai donc aucun problème à me passer de blanquette ou de magret. Je sais que certain/es n’imaginent pas leur vie sans ses plats. Pour ma part, ça ne me manque absolument pas, puisque comme des millions de personnes dans le monde, ça ne fait pas partie de mon paysage culinaire (je crois même n’en avoir jamais goûté).
Pour autant, je sais ce que c’est de vouloir changer ses habitudes, tout en tentant de garder ses petits plats préférés bien réconfortants au menu. Par exemple, j’ai toujours adoré les crêpes. C’est un reliquat de mon enfance, où les soirées crêpes étaient des moments festifs dont j’étais friande. Lorsque j’ai décidé de ne plus consommer d’œufs pour des raisons éthiques, j’ai tenté de les remplacer de mille et une manière. Sans rire, il existe bien mille et une manière de remplacer les œufs par du végétal dans les recettes !
Finalement, ce que l’expérience m’a appris, à force de tenter des alternatives, c’est que les crêpes n’ont pas fondamentalement besoin d’œufs ou de remplacement d’œufs. Exit la banane écrasée au goût trop présent, exit les graines de lin moulues qui changent la texture. On peut, si on veut, ajouter de la fécule ou de la purée de pomme, mais c’est totalement facultatif.
J’ai donc élaboré une recette extrêmement simple (avec des variantes) que j’ai publiée sur mon blog il y a déjà plusieurs années. Je pensais alors voir fleurir sur plein d’autres blogs végés des recettes simplifiées de crêpes végétales. Mais rien de tel n’est arrivé. En fait, je vois encore régulièrement des gourmands chercher désespéramment « une bonne recette de crêpes végétaliennes » et se voir conseiller des idées contenant un nombre d’ingrédients prodigieux, sensés remplacer les œufs.
Je me suis demandé ce qui poussait les gens à se compliquer la vie, alors qu’il existe une réponse si élémentaire au « problème des crêpes végétales » : il n’y a pas de problème, il suffit de ne pas chercher à remplacer les œufs.
Les pistes qui me viennent à l’esprit sont multiples :
- on à tendance à penser que plus c’est mieux ;
- on a du mal à changer de perspective pour voir les choses sous un angle différent ;
- on a du mal à accepter que ce qu’on a appris depuis tout petit (ici « les crêpes se font avec des œufs ») n’est pas une réalité immuable.
Ce sujet peut paraître futile, mais il est une bonne image de notre façon de raisonner. Nous restons coincés dans des fonctionnements, sans jamais les remettre en question. Et nous nous coupons ainsi de plein de belles expériences !
Vous l’avez compris, j’ai vraiment l’impression qu’on a tout à gagner en s’ouvrant à la découverte. C’est la même chose pour l’art, ou les voyages. Par exemple, il est simple et rassurant de vivre dans un pays dont on maîtrise parfaitement la langue et la culture. Pourtant, aussi génial soit notre pays, il est fort possible que des virées dans d’autres contrées aient bien des choses à nous offrir.
Pour rester dans cette analogie, on peut dire que goûter des plats inédits serait comme apprendre une langue, avec tout un univers à appréhender. Les mots nous conduisent à découvrir une civilisation, une histoire, il y a tout un vocabulaire à apprendre. Si on se contente de traduire mot à mot des idées d’une langue vers une autre, il sera souvent difficile de comprendre et de se faire comprendre à l’étranger. C’est en assimilant qu’on peut former les phrases de manière différente qu’on accédera vraiment à toute la beauté et la complexité d’une culture, ainsi qu’à des manières de raisonner différentes. C’est terriblement passionnant et formidablement enrichissant.
De la même manière, en cuisine, notre palais peut apprendre à percevoir de nouvelles saveurs et doit accepter de les marier de manière inhabituelle pour profiter pleinement d’un univers gustatif original. Avec le temps, nos sens s’aiguisent, deviennent plus réceptifs. Ça peut sembler déroutant, mais au final, nos références s’élargissent, notre esprit s’ouvre. Et cerise sur le gâteau : notre plaisir peut être décuplé !
La nouveauté nous nourrit, dans tous les domaines de la vie. Par extension, cela peut nous aider à mieux comprendre et accepter les autres et leurs différences. Nous pouvons devenir plus ouverts à la diversité et faire preuve de plus d’empathie. La seule condition pour profiter de ces incroyables bénéfices est d’avoir faim de nouveauté.
Mon conseil : essayez d’imaginer la cuisine végétale sous cet angle, sans œillères, vous verrez que tout est possible. Et alors… profitez !
PS : découvrez mon projet d’espace dédié à la cuisine bio végétale à Paris. La campagne de financement a remporté un grand succès !
Milounette says
J´aime beaucoup ta comparaison entre la découverte d´une nouvelle facon de cuisiner et l´apprentissage d´une langue (elle me parle peut-être d´autant plus que je suis en ce moment pour un an à l´étranger et que je vis cela dans la vie de tout les jours). Je pense aussi, que si l´on a tendance à vouloir « remplacer », c´est en partie pour se rassurer, pour garder les schémas classiques avec lesquels on a grandi… Ainsi peut-être la transition est plus facile mais je pense que cela n´est qu´une étape. D´ailleurs on voit souvent que plus cela fait longtemps que l´on est végéta*ien, moins on éprouve le besoin de manger des similis carnés (au sens large, j´y inclu boulettes de haricots…), car le plus souvent ces derniers ne sont là que pour permettre de garder le schéma de repas classique viande+accompagnement (légumes et/ou féculents)….
Elsa (Envie d'une recette végétalienne ) says
Je suis touchée et émue par ton témoignage, dans lequel je retrouve mes émotions vis-à-vis de la cuisine végétale… MERCI !!!
Virginie says
J’adhère vraiment à ta réflexion.
Je ne suis pas vegan, mais en voie de végétalisme. Sans que je me sois fixé d’objectif temporel. La transition se fait seule, à mesure que je découvre de nouveaux ingrédients, de nouvelles recettes, de nouvelles manières d’associer les saveurs. Cette transition a été initiée lorsqu’on a découvert que notre fils était allergique aux protéines de lait de vache et aux oeufs, qui sont donc bannis de la maison. Au départ, nous avons tenté de « remplacer » ces ingrédients, en cuisinant de la même manière qu’avant. J’ai trouvé ça très insatisfaisant… Je m’amuse et découvre des plats délicieux depuis que je n’essaie plus de reproduire ce que je connaissais en utilisant des substituts. D’ailleurs, je discutais de ce sujet avec mon mari ce WE. Nous avons des amis végétariens, et il y a quelques temps, je lui ai demandé si elle avait des idées de recettes rapides et adaptées aux enfants. Aucune des réponses qu’elle m’a données ne m’ont fait envie : elle cuisine comme quand elle était omnivore, en substituant. Elle tente de reproduire notamment des blanquettes ou des bourguignons, des plats traditionnels de la cuisine française, qui ne sont pas transposables tel quels… A mille lieues de ce qui me plaît dans la cuisine végétale. Sans les allergies de mon fils, aurais-je découvert des aliments que je ne cuisinais JAMAIS, le quinoa, l’épeautre, les lentilles corail, les patates douces, par exemple, qui me semblent être de vrais basiques désormais ?
Laetitia says
Bonjour 🙂
Je ne suis pas vegetalienne mais j adhère complètement à ton discours. D ailleurs, si je me tourne vers la cuisine végétale, c’est tout d abord par curiosité et par goût! Je n’ai jamais tenté de substituer des plats carnés. Je suis fan de hoummous et de ses variantes, des légumes à toutes les sauces et des desserts gourmands (la mousse au chocolat au tofu soyeux. .). Tout ça pour dire que la cuisine végétale n a pas besoin de modèle. Elle est un style à elle seule 🙂 . Et merci pour les recettes et tes billets qui inspirent la réflexion.
Laetitia
Sandrine says
Entièrement d’accord avec toi ! Et je crois bien qu’on a lu le même article de journal, écrit par une personne ayant soit un net parti pris, soit une totale incompréhension de son sujet !
Nathalie says
Je découvre tout juste ton blog et le dernier article parut me parle vraiment. Je suis devenue végétarienne il y a seulement six mois, assez brutalement, mais dès le départ j’ai adopté un peu ton état d’esprit : il y a tellement de produits nouveaux à découvrir quand on sort de nos schémas habituels qui tournent autour de la viande, alors c’est tellement plus facile de redécouvrir le monde à zéro au lieu de vouloir refaire ce qu’on connaît déjà en forcément moins bon parce que différent… J’ai fait la même découverte quand j’ai déménagé dans un pays loin du mien : au bout d’un moment, au lieu de pleurnicher sur les choses qui me manquaient, j’ai décidé de découvrir les choses que je ne connaissais pas, et maintenant c’est quand je rentre chez mes parents qu’il me manque des choses ! Ceci dit, comme tu dis il y a des plats qu’on adore depuis des années et qu’on aimerait reproduire, alors parfois on substitue. Et puis quand on vit dans un entourage non végétarien/lien, parfois substituer permet de manger à peu près la même chose que les autres. Mais ca ne fait pas de la cuisine végétarienne/végétale une cuisine de substitution !
jennijhen says
Que je suis contente de voir ce post car je suis bien d’accord avec toi. Je ne suis pas (encore à 100%) végétalienne mais j’y vais d’un pas léger et rassurant !
Léger car je vais dans cette direction mais je ne veux pas me mettre trop de contrainte et en même temps dès que je cherche une recette je la cherche toujours en version vegan.
Et Rassurant car grâce à toi (oui, je te l’avoue pour la énième fois !) je suis tombée amoureuse de cette ouverture que peut être le végétalisme.
Alors, c’est vrai que quand je veux manger un burger je chercher à me faire un steak ! Mais pas un steak qui aurait le même gout ou la même odeur de la v…… Je cherche à me faire un steak bon et rempli de saveur 🙂
Toute ma famille est dans cette direction (dès fois on fait des trucs bof … mais ça, ça arrive à tout le monde !)
Grenadine says
Hello ! Très bon article, je rejoins tout à fait ton avis. Je ne suis ni végétarienne, ni végan, je ne pense pas le devenir, mais je cuisine de plus en plus « végétal » parce que je trouve ça super bon ! J’ai découvert plein de nouveaux aliments et techniques dont je ne peux plus me passer, c’est un sacré chamboulement dans la cuisine, pour le plus grand plaisir de nos papilles. C’est tellement riche la cuisine végé, c’en est même dommage de se contenter d’essayer d’imiter les produits carnés. Alors qu’on peut tellement s’éclater autrement !
Moi je ne ressens pas le besoin de substituer, mais c’est peut-être aussi parce qu’en tant que flexitarienne (puisqu’on a un nom nous autres, eh oui^^) si j’ai envie de pâtes bolo, je ne m’interdis pas la viande hachée. Cela dit, je fais de plus en plus souvent des sauces aux légumes, légumineuses et crèmes végétales qui sont devenues la norme dans nos plats de pâtes 😉
Malaury says
Il est vrai que pour les personnes en transition, la substitution leur est utile pour ne pas ressentir la « suppression » de l’aliment en question. Mais à terme, je pense que chacun fait son chemin et se rend compte que la substitution n’est qu’illusion dans une recette/un plat qui n’en demande pas tant ! La tradition et les habitudes sont tenaces mais non irrévocables. Le goût, lui, est un vrai tour de magie qui fait oublier tous ces aliments non végé et dispensables.
Le règne végétal est on ne peut plus varié, comme son nom l’indique, on ne le sait juste pas assez ! 🙂
Anna Moog says
Ton site est une mine d’info pour découvrir cette cuisine vraiment riche et intéressante, pour toutes les personnes qui veulent changer leur assiette. Merci !